Adossé à la vitre c’est un long travelling latéral sur la droite qui commence et ce pendant une dizaine de kilomètres.
Se succèdent sur l’écran des friches industrielles, des pans de murs écroulés, des ensembles HLM du plus bel effet, des zones industrielles rouillées, des parkings anonymes couverts de bagnoles moches.
Nous sommes dans la banlieue est de Lyon, dans un tramway flambant neuf, seul signe de réelle nouveauté dans un paysage défiguré par une industrialisation ancienne, devenue au fil des années, des crises, des délocalisations une juxtaposition de ruines et d’espaces vides.
On en profité pour construire là des logements sociaux susceptibles d’accueillir une population pour qui on a déjà battu et distribué les cartes, un ensemble hétéroclite par avance voué à l’échec, aux petits boulots, à la grisaille.
J’ai l’impression que cette ville, fière d’elle, de son équipe de foot, de son histoire, de sa gastronomie, devenue patrimoine de l’Unesco, tourne le dos à cette partie d’elle-même gagnée par une lèpre grise pour regarder vers l’ouest, ses riches collines verdoyantes pleuplées de gens en bonne santé, plutôt aisés et blancs.
Gagnée par la honte elle lui a juste légué une ligne de tram, comme un gros os à ronger, pour permettre aux habitants de ces coins d’aller à la Part Dieu, grand temple de la consommation, leur permettant de rêver à peu de frais devant des vitrines remplies de biens pour la plupart inaccessibles.
Dehors il pleut comme de juste.
Le gris habille parfaitement la laideur et la misère.
Godflesh - Flowers
(Merciless EP - 1994)