On assiste depuis quelques années à un phénomène massif de résurrection de groupes de rock, vieux cadavres depuis longtemps enterrés parfois qui, tels Jason, sont frappés par un éclair et reviennent à la vie, d’entre les morts, à travers les couloirs du temps.
Dans les années 70 ou 80 on se moquait de ces dinosaures qui sortaient des albums et tournaient encore et encore pour au final produire une musique aussi consistante qu’une soupe de régiment.
Mais par un tour de passe-passe qui rend maintenant toute choses cool, avec un doigt de nostalgie qui fait prendre des vessies pour des lanternes aux quarantenaires qui souvent n’ont plus écouté de musique depuis lors, ces retours sur scène de ces vieilles gloires sont acclamés et les tournées sont pleines en ces temps de téléchargements intensifs qui éradiquent toute vie économique sur terre.
Des noms ?
Dinosaur JR, Pixies, Police, RATM, Blur, Smashing Pumpkins, Blink 182, NTM, Limp Bizkit. Que du lourd et du rentable.
Et puis début 2010 on apprend que les Swans prennent la même voie.
Je vous l’accorde de la liste précédente c’est un peu le retour dont tout le monde se fout en raison de la radicalité de leur propos et de leur absence de succès musical mondial.
Les Swans sont et resteront un groupe de happy few, qu’il faut donc citer de temps en temps en bonne compagnie pour bien étaler sa confiture culturelle.
On qualifiera leur style de catastrophe musicale (ce n’est en aucun cas un jugement) dans le genre de Throbbing Gristle sur un autre continent, soit des martèlements de batteries, un chant hurlé ou plaintif selon arrivage, des thèmes de guitares ou des samples hyper répétitifs. Un mélange de musique industrielle, de rock expérimental, de no wave et puis ensuite de choses plus apaisées, électroniques, folk ou « pop » dans la seconde partie de leur carrière.
Des groupes comme Godflesh ou les Young Gods (qui tirent leur nom du label des Swans) leurs doivent beaucoup.
Depuis 1997 plus rien.
Les 2 chanteurs Gira et Jarboe ont collaboré avec d’autres artistes (Neurosis, Jesu…) ou monté d’autres groupes (Angels of Lights …).
Et puis en 2010 Gira appelle ses vieux potes fatigués au téléphone, mais pas Jarboe dont il devait avoir perdu le numéro de portable, et relance les Swans pour faire la totale : album et tournée.
Dans mon grand ratissage musical et malgré une méconnaissance assez importante de la discographie fournie des Cygnes, enfin des premiers albums surtout qui sont trop rudes à mes prudes oreilles éduquées aux Tears For Fears, j’ai écouté ce « My father will guide me up a rope to the sky ».
J’y ai retrouvé des choses répétitive et bien crispante (Eden prison) et des trucs plus folk à chanter au coin du feu (Reeling the liars in), des moments de tension contrebalancés par des carillons très Dead Can Danciens, une comptine chanté par Devendra Banhart (le Charles Manson de la musique folk US) enchaînée sur un passage proche de la musique contemporaine, une ballade cucul de générique de fin de film (Little mouth) et surprise des refrains à base de « lalalala lalala » ou des "ahahhahahahah en choeur" sur certains titres qui risquent d’en étonner plus d’un.
Cet album me semble être une espèce de synthèse des différents moments du groupe avec des musiciens qui justement furent de ces différentes époques musicales.
Les fans de la première époque option no wave-industrialisation-répétition vont crier au scandale (mais combien sont encore vivants ?) les autres, et surtout ceux intéressés par la fin des Swans et les albums des Angels of Lights ensuite apprécieront ce brassage et cette manière de réanimer ce groupe 13 ans plus tard de manière toujours radicale et personnelle.
Pour ma part j’y ai trouvé un grand titre (Jim) qui m’accompagnera de nombreuses années et peut être la promesse d’un bon concert le 2 décembre prochain à Feyzin.
Swans - Jim